Relation d’ordre, relation d’équivalence

Les maths font peur, ce n’est pas nouveau. Même à un physicien comme moi, qui s’est souvent senti intimidé face à des développements trop abstraits, pas utiles (à première vue, mais il faut se méfier !) à la résolution des problèmes de physique. Pourtant, on a beau dire, mais les mathématiques constituent une école de rigueur irremplaçable. Et qui n’est pas capable de rigueur dans le raisonnement est une cible idéale pour tous les charlatans, manipulateurs et autres personnes mal intentionnées, qui font profession de vivre grâce à l’ignorance des autres plutôt qu’en monnayant un véritable travail.

Du temps où j’étais collégien (quelque part entre l’extinction des dinosaures non-aviens et maintenant), on enseignait dès la cinquième les notions de relation d’ordre et de relation d’équivalence. Aujourd’hui, il semble que ces notions simples et utiles aient été repoussées à des stades très ultérieurs… alors qu’elles sont de la plus haute importance pour démonter nombre de manipulations dans lesquelles nous baignons ; en particulier quand il s’agit de discuter d’égalité. Essayons de voir comment, mais d’abord, commençons par donner des définitions : en maths, inutile de parler de ce qu’on n’a même pas défini. Que les mathématiciens me pardonnent, mon langage ne sera sans doute pas aussi précis qu’il est souhaitable dans la discipline, mais il vise à être compris du plus grand nombre tout en dissipant le maximum d’ambiguïtés.

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Les habits neufs de la médecine (E&R)

[Note de l’administrateur de ce blog : voilà un excellent article de la Section Santé d’Égalité & Réconciliation sur un problème qui déborde largement le champ de la médecine, mais qui y est particulièrement aigu en raison de la complexité du vivant.

Cela me rappelle une réflexion que m’avait faite mon directeur de thèse lorsque je lui avais dit que j’avais acheté, bien des années auparavant, un gros bouquin de biologie cellulaire avec l’intention de le lire, mais que je ne l’avais toujours pas fait. “Tu peux le jeter !” m’avait-il répondu, “ce n’est pas comme en physique où les théories restent valables à l’échelle du siècle ou plus, là, ça change tout le temps !”

En médecine comme ailleurs, l’esprit de système fait des ravages… par contre, des approches alternatives, si elles sont menées avec le plus grand “sérieux” c’est-à-dire avec la rigueur et l’esprit critique propres aux sciences, peuvent réaliser de petits miracles. Et gratuitement ou presque… c’est d’ailleurs peut-être là le “problème” (pour certains).]


Dans le conte d’Andersen, deux escrocs font la promesse à l’Empereur d’un vêtement tissé si fin qu’il en devient invisible aux yeux des artisans moins doués qu’eux, et par la même occasion aux yeux de toute personne trop sotte pour s’apercevoir de sa valeur. La fable décrit bien ce qu’est un secret de polichinelle : tout le monde voit la supercherie, mais continue de faire comme si. À bien des égards, on peut se demander si le vernis de la science ne joue pas ce rôle en médecine. La médecine scientifique occidentale brille de mille feux partout dans le monde, sauf pour les sots ! Car pour le quotidien d’un grand nombre de malades, malgré la litanie « progrès, technicité, recherche, espoir » égrainée comme un chapelet en toute occasion, la médecine est nue.

Vive la science

Bien sûr, il n’existe pas d’autres voies pour saisir la réalité objective, – réalité complexe, chaotique et contradictoire –, que de partir à la recherche d’invariants et de relations de causalité qui nous la rendent plus lisible. Modéliser le monde, ou le corps humain, est une démarche indispensable pour comprendre et se repérer. La science construit des modèles théoriques, qui deviennent ainsi une approximation de la réalité, imparfaite certes, mais utilisable à l’image des « modèles anatomiques » en trois dimensions des facultés de médecine, conçus pour visualiser le corps humain et tenter d’en dévoiler les structures. Ainsi coordonner ses connaissances et construire un système relève d’une nécessité d’ordre logique et épistémologique. En revanche il faudrait se souvenir que la réponse à cette nécessité n’est qu’une représentation simplifiée de la réalité. Simplifiée, idéale, et donc fausse.

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Face au nihilisme : « retrouver notre vouloir-vivre
de Nation » (Pierre Le Vigan)

[Note de l’administrateur de ce blog : sur une forme de nihilisme “de gauche”, c’est-à-dire se définissant comme “progressiste”, voir aussi l’œuvre très moqueuse de Jean-Claude Michéa, et notamment “Les mystères de la gauche” dont j’ai déjà parlé ici.]


Antisémitisme : les Gilets Jaunes convoqués devant
le tribunal médiatique (Réseau International)

[Note de l’administrateur de ce blog : tous ceux qui s’attaquent en profondeur au pouvoir ou au discours dominant (qui sont évidemment liés) finissent tôt ou tard par être traités d’antisémites ; je suis bien placé pour le savoir. C’est maintenant le tour des Gilets Jaunes.

Mais si l’on peut mentir à une personne tout le temps ou à tout le monde de temps en temps, il est impossible de mentir éternellement à tout le monde tout le temps. Parce que la raison finit toujours par être plus puissante : une démonstration n’est pas valable parce qu’une majorité de personnes a voté pour, mais parce qu’elle est juste. Et donc contagieuse.

Ici Jean Pérès démontre calmement et avec méthode la vacuité du discours médiatique sur la “hausse des actes antisémites” en France, mais également le réel danger que représente pour nos compatriotes juifs le discours de ceux-là même qui prétendent lutter contre les actes et discours “antisémites”. En associant invariablement, en effet, toute critique radicale du système capitaliste à l’antisémitisme, tout particulièrement avec cette tentative de diabolisation des Gilets Jaunes, ces faux intellectuels et vrais irresponsables ne font qu’avaliser le cliché “c’est la faute aux juifs”.

Il est temps de rabattre le caquet à des parasites médiatiques aussi nuisibles. Comme le dit très bien l’auteur de l’article : “Les outrances des éditocrates ont, avec le temps, perdu de leur crédibilité, et apparaissent, même aux yeux les moins avertis, pour ce qu’elles sont : de la gonflette intellectuelle infatuée d’elle-même.”]


Entre le 10 et le 20 février, un certain nombre d’actes antisémites ont été relatés par les médias [1]. Cette séquence s’inscrit dans un contexte particulier, puisque le 11 février, le ministre de l’Intérieur rapportait les statistiques de l’année 2018 sur les actes antisémites, et s’inquiétait de leur augmentation de 74%. Ce chiffre sera par la suite une sorte de leitmotiv avancé dans la quasi-totalité des évocations de l’antisémitisme par les médias. Mais c’est surtout à partir de l’agression verbale antisémite d’Alain Finkielkraut par des Gilets Jaunes, le 16 février, qu’une grande partie de la classe politique, des intellectuels médiatiques et des éditocrates ont accusé les Gilets Jaunes d’être à l’origine de cette « explosion » d’antisémitisme.

Augmentation de 74 % des actes antisémites

Le 11 février, au soir de la profanation des portraits de Simone Veil et du mémorial dédié à Ilan Halimi et sur le site de ce mémorial, le ministre de l’Intérieur annonçait une augmentation de 74 % des actes antisémites au cours de l’année 2018. Le ministre dira même que « l’antisémitisme a progressé de 74% dans ses cris d’horreur l’année écoulée » (ce qui n’a pas de sens et sera corrigé par le communiqué officiel [2]). Les médias ont repris ce chiffre de 74% pour dénoncer une forte recrudescence des actes antisémites au cours de l’année 2018, certains n’hésitant pas à parler d’« explosion ».

Précisons-le d’emblée : notre propos n’est pas tant de tergiverser sur les chiffres – chaque acte antisémite est un acte de trop – que de montrer comment les grands médias, ayant dans leur grande majorité exhibé en « une » ce pourcentage, l’ont utilisé de manière décontextualisée.

En effet, parler d’une augmentation de 74% des actes antisémites n’est pas faux si l’on compare à la seule année précédente, 2017, mais doit être nuancé si l’on se réfère à une plus longue période. Certains médias ont d’ailleurs remis la déclaration du ministre en perspective au lieu de la reprendre les yeux fermés. C’est le cas, dès le 11 février, de FranceInfo, et le 12 février, de France Culture, de LCI, des Décodeurs du Monde ou encore du Figaro.

Le 14 février, Jérôme Latta propose sur son blog (hébergé par Mediapart) une analyse de ce chiffrage dans un article intitulé « Actes antisémites : un pourcentage est-il une information ? ». Il indique que le chiffre d’une augmentation de 74%, qui peut paraître très alarmant, se rapporte à un nombre relativement restreint d’actes : 311 en 2017 et 541 (+74%) en 2018 : « On peut d’abord estimer, même si cela mérite débat, que relativement à une population de 67 millions d’habitants, les faits concernés sont (intolérables mais) marginaux. On doit surtout affirmer que la variation de ce chiffre d’une année à l’autre est d’une portée très limitée, potentiellement trompeuse. » À propos de cette statistique annuelle, Jérôme Latta reproduit le tableau suivant :

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Pourquoi les petits enfants sont-ils malades en voiture
plus souvent que leurs parents ?

<i>Le</i> pendule est l'élément central de <i>la</i> pendule <br>(et du coucou).

Le pendule est l’élément central de la pendule
(et du coucou).

La semaine dernière, j’encadrais des travaux pratiques de physique pour des étudiants de première année. Parmi les expériences à réaliser, figurait l’étude des oscillations d’un pendule pesant. Comme beaucoup d’expériences maintenant, celle-ci était informatisée, l’axe du pendule (constitué d’une tige métallique sur laquelle est serrée une masselotte) étant relié à une centrale d’acquisition qui mesure l’angle du pendule à intervalles de temps réguliers, et le transmet à un logiciel qui peut ainsi afficher de belles sinusoïdes plus ou moins amorties sur l’écran de l’ordinateur.

Une bonne partie du temps de travail des étudiants consiste à produire des courbes correctes d’abord (donc à apprendre le maniement du logiciel), avant de les analyser et d’en tirer des informations, comme par exemple l’accélération de la pesanteur terrestre (notée habituellement g). En effet, pour un pendule simple et dans l’approximation des petites oscillations, la période T_0 d’un pendule de longueur l est donnée par la célèbre1 formule :

    \[ T_0 = 2\pi\sqrt\frac lg \]

En mesurant cette période (avec un chronomètre) et en mesurant la longueur du pendule (avec une règle), on  peut donc déterminer l’accélération de la pesanteur,

    \[ g = l \left( {2\pi} \over {T_0} \right)^2 \]

L’expérience est assez simple et donne des résultats plutôt “jolis” à l’écran, c’est-à-dire conformes aux belles courbes théoriques introduites en cours par les enseignants. Mais justement, c’est ce côté précis et un peu froid qui rebute souvent certaines personnes dans la physique. J’eus alors l’idée de m’échapper un peu du cadre strict de la physique “désincarnée” pour poser aux étudiants une devinette : “savez-vous pourquoi les petits enfants sont souvent malades en voiture ?”

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